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Fin de vendanges au Domaine de la Touraize à Arbois.

Dernière mise à jour : 12 oct. 2023

Chaleur Jurassienne

Réchauffement climatique oblige, la fin du mois de septembre est exceptionnellement douce, chaude même dans le Jura. A Arbois, centre tellurique du haut vignoble jurassien, les vendanges s’achèvent sous un soleil piquant. Au bistrot des Claquets, de jeunes vendangeurs et vendangeuses en short et vieilles baskets viennent manger un plat et échanger sur le labeur, ultra physique, en cours depuis une bonne quinzaine de jours dans les domaines alentour. Il y a des français, des japonais, des américains, tous disciples du culte bachique dont la région est un des hauts lieux depuis des siècles et de sa section la plus pure, celle des vins natures et en biodynamie depuis environ 20 ans.


Pour tout vous dire, c’est la pire période pour rencontrer les vignerons : ils travaillent d’arrache pied, soit à récolter les dernières grappes, soit à encadrer le travail de vinification.



Grâce aux bons soins de Silvia et Lionel de l’oenothèque La Sidéral basée à Lons le Saunier, nous avons pu passer un bon moment avec Héléana, André Jean et Victoria Morin du domaine de la Touraize qui nous ont ouvert les portes de leur chai. C’était pas gagné parce que même après le départ du gros de l’équipe de vendange (18 coupeurs, 2 tractoristes, 3 bouilleurs et 7 en postes à la cave) , y’avait du pain sur la planche.



Victoria, la fille de Héléana et André Jean se dédouble pour nous reçevoir aux côtés de sa mère tout en gérant les derniers ouvriers présents. A 30 ans, des études à Sciences Po Lyon, un passage dans l'événementiel à Paris , et des études en viticulture au campus montmorot, elle enchaîne sur un stage chez Marcel Lapierre dans le Beaujolais avant de regagner le domaine familial.

Les vendanges, dit-elle, c'est un peu comme une prod’ dans l'événementiel, tout est histoire de timing.

Le temps, c’est le temps de la vigne et de la terre bien-sûr, pas celui des stratégies commerciales. Il suffit de lire le cahier des charges Demeter ou de parler avec un vigneron qui travaille en biodynamie pour comprendre que tout commence par une parfaite connaissance des sols et du cep de vigne pour faire du vin, du bon, un produit qui n’aura pas besoin de “post-production” et d’artifice.

Quand le raisin a atteint sa maturité, il faut savoir décider quand couper, et ça, dans le contexte climatique actuel, ça devient extrêmement délicat. Cet été, le Jura a été en alerte canicule pendant plusieurs semaines et la plupart des vendanges étaient finies fin août. Mais heureusement il avait plu plus tôt dans l’été, le méga stress hydrique a donc été évité.


2023, une récolte au top

Au final, les Morin sont contents, très contents même comme la plupart des vignerons du coin.

La récolte est mirifique. Beaucoup de raisin, quasi pas de perte et en vinification on apprécie déjà un bon équilibre entre sucre et acidité dans les jus.

Une bonne odeur de raisin macéré flotte dans l’air du chais, qui est beau et propre. Ici pas de cave voûtée du 13ème siècle. On travaille de plain-pied et dans d’excellentes conditions d’hygiène. Et oui n’allez pas croire qu’on patine dans la bouse de corne de vache. Le bio, c’est clean.


Mécanique des fluides et des fûts


Dans les fûts, les prémisses des Poulsard, Savagnin et Chardonnay fermentent doucement.

“Y’a des trucs à goûter? demande Héléana à son époux en voyant nos yeux goulus.

C’est drôle d’entendre parler de "truc" lorsque l’on se trouve dans un lieu sanctuarisé comme celui-ci. Mais après tout c’est très juste, ce qui se trame dans ces barriques de bois, c’est une matière en devenir, un liquide plein de potentiel qui n’a pas encore atteint son terme, qui n’est pas encore du vin donc.

Héléana et Victoria prélèvent à même le fût un peu de “futur Poulsard”.

Le Poulsard, ou Ploussard, c’est THE cépage rouge jurassien, enfin rouge, il est plutôt rose profond, comme les vins dans les animés japonais. Dès le premier nez, on sent les fruits rouges, fraise, framboise mais tout en vivacité.

C'est très gourmand, on a tout de suite envie d'en boire plus , tout de suite maintenant mais Héleana me calme gentiment.

"C'est souvent ça avec le Poulsard et avec beaucoup de vins naturels, on pense qu’il faut les boire dans l'instant alors qu'ils font aussi de bons vins de garde".

Elle a raison.

Et d’ailleurs nous quittons le chai pour aller boire des vins “faits” côté boutique.

Des histoires qui se boivent

Sur les étagères des bouteilles et des fossiles, énormes, trouvés dans les vignes qui nous rappellent qu’avant, dans ces coins de collines et de raisin, il y avait la mer. Le domaine de la Touraize a choisi l’ammonite, cet espèce de gros coquillage enroulé sur lui-même pour ses étiquettes. C’est beau et simple, le mouvement en spirale du fossile rappelle le cycle de la vie.

La vie, elle peut être rude dans le Jura. Comme en 2021 où le gel a fait d’immenses dégâts, les viticulteurs y ont perdu 60 à 90 % de leur future récolte, une catastrophe. André-Jean l’évoque avec émotion alors que nous goûtons le chardonnay rescapé de cette année meurtrière où plusieurs vignerons se sont donnés la mort. Il est vif et délicieux mais “On sent une minéralité froide dans ce millésime” comme il dit.


Reflet du terroir et des humeurs des éléments, le vin nature est une vraie métaphore de l’existence de la terre et des gens qui l’ont produits, plus que les vins dits traditionnels qui sont souvent le fruit d’une recette qu’on applique pour obtenir un goût pré-déterminé. Le vin nature au contraire est plein de surprises, je ne parle pas de déviance (de souris ou de peau de saucisson comme disent les gens du milieu) mais plutôt d’une forme d’expressivité qui se dégage différemment à chaque millésime et que celui qui a un peu de nez et de palais saura percevoir. Pour ma part, je suis une néophyte et je m’estime chanceuse d’avoir pu goûter aux vins et aux histoires de calcaire et de marnes blanches du Domaine de la Touraize.


Et comme à chaque fois, j’ai sans doute écrit de manière trop documentaire, alors je droppe ci dessous les vins coups de coeur du Domaine:




  • Chardonnay, Les Voisines 2020

pureté minérale légèrement tourbée. Ligne aromatique d’agrumes citronnés

  • Ploussard, La Cabane 2020

AOP Arbois, monocépage 100% Ploussard. Un vin rouge rond, aérien et délicat, sur le fruit rouge et l’écorce d’orange, aux tanins très souples.

  • Le Pet’nat, Les dix bulles: assemblage de Pinot et Trousseau.

Vif et rafraîchissant avec une aromatique fruitée où se mêlent framboise et autres petits fruits rouges. A boire tout l’été avant d’aller faire un plouf dans le lac de Vouglans!


Pour plus d’info: Domaine de la Touraize












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