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La route de Cormac McCarthy, une leçon de survivalisme

Dernière mise à jour : 27 juin 2023


J'ai lu The Road de Cormac McCarthy quelques jours avant sa mort... oui je sais, tout le monde l'avait déjà lu mais mieux vaut tard que jamais.

J'ai adoré l'écriture, les juxtapositions nerveuses qui donnent à voir un paysage entier que le lecteur assemble lui-même avec toutes ces phrases courtes et sans verbe.

Durant la lecture, j'étais transie de froid comme cet homme et son fils, pauvres ombres errantes sur une terre dévastée trainant un charriot remplis de débris. Et cette pluie, cette pluie qui tombe presque en continu sur tous les chapitres!

Il m'a semblé que cette marche forcée, infinie et vaine vers un lieu que ce père imagine meilleur pour lui et son fils est la métaphore de la vie dans ce qu'elle a de plus fondamental et cruel: un passage dans le temps et l'espace où l'on doit malgré tout manger, se déplacer, dormir et faire ses besoins.


"Ce qui l'inquiétait le plus c'étaient leurs chaussures. Ça et la nourriture. Toujours la nourriture".


SE NOURRIR APRES L'APOCALYPSE


Parlons du premier point, manger, qui est le thème de ce blog:


Dans La route, la nourriture manque, donc elle est omniprésente.

On y pense en permanence, on rêve d'en avoir et quand on en trouve on a peur qu'il n'y en ait plus. Et puis, pire encore on craint de finir mangé par d'autres survivants. Il y en a peu mais ils sont a priori "méchants" pour la plupart, comme l'indiquent les os, les crânes vidés et les dépouilles plantées sur des pics que l'homme et l'enfant croisent sur leur chemin. Eux, se sont jurés de ne pas manger d'autres humains.


A plusieurs reprises dans le roman, le père part en repérage dans des maisons abandonnées pour chercher leur pitance.

A chaque expédition on découvre des intérieurs abandonnés, des cuisines, des fonds de tiroir et de placard. Avec ce style si particulier, Mc Carthy nous dresse un inventaire de ce qui reste des productions humaines. Des planches, des visses, des outils, des bocaux, des carcasses de voiture... Une fois, ils tombent sur un distributeur de soda abandonné où il reste une cannette de coca. Le père dit à son fils de tout boire car il sait qu'ils n'en trouveront sans doute jamais plus. Quant au frais et à au vivant, il n'y en a pour ainsi dire plus dans ce monde fini. Quand l'homme trébuche sur une pomme rassie on est pris de surprise, comme lui. Et il la mange en entier cette pomme morte, avec le trognon et les pépins.

Le soir, le père veille pendant que son fils dort et pense au monde dans lequel ils sont condamnés à errer: " le monde se contractant autour d'un noyau brut d'entités sécables. Le nom des choses suivant lentement ces choses dans l'oubli. Les couleurs. Le nom des oiseaux. Les choses à manger. Finalement les noms des choses que l'on croyait être vraies."


ODE AUX BOITES DE CONSERVE

Globalement tout ce qui a survécu à cet apocalypse dont Mc Carthy ne nous donne pas les détails c'est la nourriture en conserve. Et heureusement les foyers américains semblent être assez bien pourvus. Ne sommes nous pas dans le grand territoire du survivalisme hérité des pionniers?

Et bien je peux vous dire qu'à la page 126 de l'édition Points du livre, l'émotion est grande lorsque le père tombe sur une caverne d'Ali baba de prévoyants preppers, un abri rempli de caisses: "des tomates, des pêches, des haricots blancs, des abricots. Du jambon en boîte. Du corned beef. Des centaines de litres d'eau dans des jerricanes de vingt cinq litres en plastique."...

...

Chili, mais, ragoût, soupe, sauce spaghetti. L'abondance d'un univers disparu."

La découverte de ces provisions permet de rompre, l'espace de quelques pages avec le rythme éreintant de la marche. Père et fils se posent quelques jours, se lavent, se changent, et font des festins de jambon et de biscuits. Sans oublier ce passage de délectation autour d'un pot de poires en conserve dont ils lèchent jusqu'à la dernière goutte l'épais sirop sucré...


LE DERNIER SOUPER

Je dois dire avoir été émue par ce passage et par tous les autres où les deux personnages s'assoient ensemble devant un vrai repas. Mc Carthy décrit avec précision tous les gestes de préparation et le recueillement avec lequel ils ingèrent chaque bouchée comme si c'était la dernière. Tout le récit est traversé par l'angoisse que la terre est morte et n'a plus rien à offrir, qu'elle est une écorce desséchée qui porte encore des hommes mais plus pour longtemps, car sans doute, ils ne lui survivront pas. Si on peut penser que la planète se régénérera plus tard, les humains qui ont fait le choix de ne pas manger leurs congénères seront morts de faim avant qu'elle ne porte des fruits à nouveau...


"Les jours trainaient sans date ni calendrier. Le long de l'autoroute au loin, de longues files de voitures carbonisées en train de rouiller (...). Ils continuaient. Marchant sur le monde mort comme des rats tournant sur une roue."


Habitante de la prospérité, je ne pense jamais à acheter des fruits en bocaux et des haricots blancs en boîte mais après la lecture de La Route, je crois bien que je vais me faire une petite réserve... Et puis je vais peut être aussi voir l'adaptation du roman au cinéma, avec Viggo Mortensen et chercher la fameuse scène des poires au sirop.

Ah ben tiens, la voilà, visible ici sur ce mix Youtube.




Note: J'ai découvert un site américain de kit de bouffe survivaliste qui répond au beau nom de My Patriot Supply. Pour ceux que ça branche de voir l'offre lyophilisée, en sachet ou en conserve, c'est ici.








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