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  • Photo du rédacteurleo22062

Passion Pastèque

Il y a des fruits qui annoncent l'été.

La pastèque en fait partie.

D'autant plus qu'elle est grosse, il faut bien le dire. En France, sur les étals des marchands, elle ne passe pas inaperçue, les melons de Charente ont l'air de balles de ping-pong à côté d'elle.

En Asie, où j'en ai beaucoup mangé, on en trouve des murs entiers, les vendeurs peuvent même se caler dessus pour faire une sieste quand la ville est broyée de chaleur et que l'air tremble entre les pots d'échappement.

西瓜西瓜西瓜

En Chine, l'été, la pastèque est partout, transportée par des paysans assis sur des monticules de fruits à l'arrière de camions poussiéreux. Ce sont les mêmes paysans qui ramènent les choux l'hiver venu et jouent au même jeu de construction avec les légumes.


Je n'ai pas un copain chinois qui ne m'a pas parlé de ses souvenirs d'enfant à manger des pastèques quand la Chine n'était pas encore une super puissance et qu'on se contentait de choses simples. Pastèque, bonbon Big Rabbit, glace à l'eau, graines de tournesol, ce genre de choses... Un ami, Yanjun, m'a parlé notamment d'une dysenterie mémorable dans ses jeunes années provoquée par une surdose de pastèque....


Dans Beijing Silvermine , géniale archive qui portraiture la Chine des 80's au début des années 2000 à travers des centaines de milliers de négatifs qui rendent compte de la vie quotidienne des gens pendant les "trente glorieuses chinoises", la pastèque occupe une place de choix, c'est presque un modèle typologique : Pastèque/ enfant, pastèque en chapeau, pastèque en groupe ou en solitaire, avec les doigts ou à la petite cuillère, elle remplit des pellicules entières.


Il y a une romancière, Sheng Keyi, qui a publié il y a peu un roman intitulé "Le goût sucré des pastèques volées". Quand je l'ai vu la première fois chez mon libraire, j'ai souri. Puis je l'ai feuilleté. C'est un joli roman composé de petits chapitres qui sont autant de souvenirs d'enfance de l'auteure dans son village natal du Hunan rural: Son grand-père, les concours de pipi, l'étang aux lotus. Des sons, des odeurs, des images; le clair de lune, la chasse au grenouille etc...

Au final, ce récit est plein de nostalgie car la vie décrite par Sheng Keyi, a bel et bien disparue dans le fracas du développement de la Chine contemporaine...


Beauté des formes

Pour en revenir à la pastèque et à sa forme.

Elle est grosse mais pas seulement.

Elle est ronde, oblongue, lisse, comme un ballon merveilleux, comme un oeuf de dinosaure fantastique.

A l'extérieur elle luit d'un vert sombre strié de lignes plus claires et, dès qu'on y plante la lame pointue d'un couteau, c'est une chair d'un rouge presque surréaliste qui apparait toute tachetée de pépins noirs.

Mais le plus magique de tout c'est bien-sûr toute cette eau sucrée qu'elle renferme en elle. Telle une beauté lymphatique et généreuse, elle stocke du liquide pour désaltérer celui qui viendra la grignoter et la sucer.


Pastèque Porn

En 2005, le réalisateur Taïwanais Tsai Mingliang, a sorti "La saveur de la pastèque" un film en forme de comédie musicale complètement déjanté où les protagonistes se nourrissent de pastèques pendant un été caniculaire. Les scènes alternent entre chansons, chorégraphies et scènes de cul où la pastèque et les muqueuses du sexe féminin sont clairement associées. C'est un des films les plus fous que j'ai vu! Pourtant, le titre original en chinois est "天邊一朵雲", "un petit nuage au bord du paradis", ce qui me laisse perplexe, car il n'y a rien de céleste dans ce film plein de moiteur et de sucs de fruits collants. Pour une fois je trouve le titre en français plus adapté. Voici la bande annonce ci-dessous:





L'année dernière j'ai pris des étals de pastèques en France, en Grèce et en Bulgarie. Dans chaque lieu, l'été battait son plein et chacune des images prises me rappèle des marchés pleins de torpeur.

Depuis le mois de Mai de cette année la saison des pastèques est officiellement ouverte, du moins Rue du Faubourg du Temple, et j'ai repris mon habitude de les prendre en photo avec mon Tel ou mon Olympus.


Comme souvent, lorsque je m'entiche d'un élément, le plus souvent visuel, il prend un malin plaisir à apparaitre régulièrement dans mon champ de vision allant jusqu'à me faire croire qu'il s'agit d'une filature dont je fais l'objet et non l'inverse. De fait, cela fait quelques semaines que je vois des pastèques partout, d'où l'origine de ce post qui restitue mon obsession.

J'ai vu une fille dans le métro avec un sac en peluche en forme de pastèque, et dans un vide grenier à Pernety j'ai trouvé un taille crayon pastèque en bois, puis sur Facebook je suis tombée sur une peinture de ma copine chinoise Meimei, représentant un florilège de fruits rouges où trônent de belles tranches de pastèque bien pointues sur fond de papier blanc rehaussé de calligraphies et puis, j'ai carrément trouvé un numéro du magazine Club Sandwich complètement dédié au gros fruit. Je vous conseille d'ailleurs The Watermelon Issue, en vente à l'excellente Librairie Sans Titre. J'hésite à contacter l'éditrice au cas où elle penserait à une appendice pour ce numéro...


Toujours dans la même thématique, je pense à cette photo d'Araki représentant une Geisha en kimono accroupie dans une ruelle à suçotter de la pastèque. L'asphalte est sombre et contraste avec la chair rose du fruit qui semble avoir été ouvert par éclatement et non pas avec une délicate lame nippone. Le tout est éminemment érotique évidemment, comme tout ce que touche Araki.

Et pour finir avec un volume pareil et des couleurs pareilles, la pastèque prend des allures de grosse odalisque dans les natures mortes de Rubens Peale, un peintre américain du 18-19ème siècle.

Par contre, je remarque qu'elle n'apparait pas encore dans les Quatre Saisons d'Archimboldo, j'en déduis qu'on n'en mangeait pas encore beaucoup en Europe au 16ème... affaire à suivre.


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